Les "Vates" gaulois, champions des médecines douces
En 70 avant notre ère, vivait au cœur du Morvan un guerrier gaulois d’une tribu des Eduens, appelé Cautos. Avec sa femme et ses enfants , il habitue une hutte en terre séchée couverte de chaume, au centre de son village, protégé par une simple palissade de bois. Comme la majorité de ses congénères, il est agriculteur, éleveur (il a une vache et quelques animaux de basse-cour) et aussi, chasseur, Occasionnellement, il devient guerrier et participe aux combats que les Eduens livrent aux tribus voisines, afin de s’assurer la suprématie sur les autres peuples de la Gaule. Ces luttes entre tribus étaient d’ailleurs le fléau de la Gaule et César sut habilement s’en servir pour mettre à genoux des peuples valeureux avec quelques légions bien équipées surentraînées et faisant preuve de cette discipline qui manquait tant à nos ancêtres.
L’existence de ce paysan-guerrier est rude, mais du moins, peut-il remercier les Dieux qu’elle lui procure l’essentiel pour vivre et faire vivre sa famille, mais aussi la certitude de l’immortalité. Il sait, car les Druides le lui répètent qu’après sa mort, son âme immortelle se réincarnera dans le corps d’un autre guerrier gaulois. Et si les Druides, ces sages vêtus d’une grande robe blanche, le disent, c’est que c’est vrai. Ne savent-ils pas lire les messages des astres dans le ciel ? ne sont-ils pas en communication avec les Dieux ? n’ont-ils pas percé les secrets de la nature ? ne connaissent-ils pas le fonctionnement du corps humain ? A ce titre, ils ont donné le pouvoir de guérir à une classe particulière, les « VATES » qui sont les médecins « généralistes » de ce temps-là, administrant des remèdes et se livrant, pour les malades, à des incantations magiques.
Cautos en a eu la preuve éclatante : son fils était porteur de vers intestinaux provocant d’intolérables démangeaisons anales. Le Vate du village prépara la recette suivante : absinthe sèche et corne de cerf brûlée, graine d’ache (céleri) écrasée, le tout à boire dans un peu d’eau. Trois jours après, l’enfant n’avait plus de vers. Quelques temps auparavant, le Vate avait calmé le douloureux lumbago de son épouse en lui appliquant sur les reins une herbe appelée « brieumum » en gaulois. Cette application locale a été relevée par un spécialiste Romain de la médecine gauloise : Marcellus, qui vivait à Bordeaux au IVè siècle de notre ère. Or, le « brieumum » n’est autre que l’armoise, qui, outre, la propriété sédative indiquée, était reconnue comme abortive. Mais on ne sait pas si les vates gaulois l’utilisaient à cette fin.
Ce qui est certain, c’est que ces « médecins » sous la dépendance des Druides, étaient des phytothérapeutes de premier ordre, tous les remèdes qu’ils obtenaient à partir de plantes soigneusement choisies par eux étaient efficaces. A telle enseigne que les indications qu’ils donnaient, il y a plus de 2000 ans sont, pour beaucoup d’entre elles, encore valables de nos jours. Quelques exemples nous permettront de le préciser.
Ainsi, le « korna », nom gaulois de l’aigremoine était utilisé à la fois comme anti-inflammatoire et comme médicament du foie. Le « betilolen », autrement dit la bardane, servait à soigner certaines maladies de peau et les plaies infectées. Or, on s’est aperçu que la feuille de bardane renferme un principe bactéricide actif sur certains germes infectieux, ce qui expliquerait son efficacité dans certaines affections cutanées. Quant au « sistrameor », nom gaulois du fenouil sauvage, non seulement il était efficace contre les calculs urinaires mais encore, « il purifiait les femmes qui venaient d’accoucher » assure le médecin grec Dioscoride ( 1er siècle de notre ère. De nos jours, le fruit du fenouil a confirmé sa réputation d’ami de la digestion, à l’exclusion d’autres propriétés.
Le « belen », jusquiame en Français, servait à soigner les névralgies douloureuses, certains maux d’oreille. Le « souivitis » nom gaulois du lierre calmait les maux de tête et les ulcères. Il avait aussi la réputation de freiner l’enivrement, peut-être cela explique l’usage qu’avaient les Bardes de se ceindre le front de lierre quand ils animaient un festin. Certains travaux actuels ont mis en lumière un pouvoir hypotenseur chez ce végétal qui expliquerait, en partie, son efficacité dans les maux de tête.
Citons encore la verveine, l’un de ses composants, la verbénaline, la rend active sur le plan digestif ; l’achillée, la bétoine, la camomille et la centaurée : ces plantes médicinales étaient employées systématiquement par les Vates gaulois et la grande majorité d’entre elles constituent encore la base de très nombreuses préparations phytothérapiques.
Mais, la plante reine de la thérapeutique druidique était le gui, dont la cueillette donnait lieu à une cérémonie très « solennelle », dit Pline, où dans une atmosphère mystique, « le Druide vêtu de blanc montait dans un chêne et, avec une faucille d’or, coupait le gui ». A quoi servait-il ? Pris en boisson, il passait pour donner la fécondité aux animaux ; s’il n’avait pas touché terre, il était bon en infusion contre l’épilepsie et aidait à la cicatrisation des plaies *. Actuellement il est considéré comme un hypotenseur.
Un mystère total entoure quatre végétaux, parmi les plus utilisés par les Vates gaulois , nommés « selago », « samolus » « chamalea » et « limaeum ». Malgré les efforts des chercheurs, il a été impossible d’identifier les espèces ainsi désignées. On sait aussi que les Gaulois étaient de fervents adeptes des eaux. Le Dieu des sources, BORVO, les encourageait à se baigner couramment en même temps qu’à boire des eaux de sources « miraculeuses ». Le thermalisme, comme on dirait aujourd’hui, était très développé en Gaule bien avant la conquête romaine. Du reste, après la conquête de la gaule par César, les romains adoptèrent les sources fréquentées par les Gaulois, ils en changèrent le nom, tout comme celui de la divinité protectrice, Apollon remplaçant Borvo.
Dans ce panorama rapide de la médecine de nos ancêtres, quelle place pouvait avoir la chirurgie ? Nous disposons de peu de documents, dans la mesure où les Gaulois comme tous les Celtes, incinéraient les corps de leurs défunts. Si quelques fragments osseux indiquent que la trépanation était connue des Vates, aucun instrument chirurgical attribuable aux Celtes n’a été retrouvé. On présume pourtant que, pour certaines opérations, vin et bières étaient employés en guise d’anesthésiques, et aussi, parfois, la musique, mais nous ne disposons d’aucune preuve à cet égard. Le tout, sur fond de procédés magique, d’incantations, de port d’amulettes autour du cou, de prières aux Dieux, à Gaibwin (Gobgnew), le Dieu forgeron.
Extrait d’un article de Pierre BOURGET
Paru dans le magazine Top Santé de décembre 1996
* Des expériences ont démontré que des boules de gui déposées dans un récipient puis écrasées, laissaient apparaître au bout d'un moment, en surface, une moisissure dont les propriétés s'avéraient être voisines de celles de la pénicilline. On pourrait donc en déduire que les Druides et les Vates étaient capables de soigner avec cet ancêtre de nos modernes antibiotiques.
D'autre part, des verts anticancéreuses du gui on également été découvertes. Voir à ce sujet le remarquable monographie de notre Grand Druide /I\ Vosegus sur les bienfaits de cette plante.
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