Le verbe et la substance
Tout est fait de verbe et de substance . Le Verbe universel possède l’effectivité et détermine le principe de ce qui est. La Substance universelle possède l’effectualité et donne l’origine à tout ce qui existe. Le verbe est pour nous inqualifiable, il est la VIE dans son inconcevable essence . L’action du verbe sur la substance constitue la partie positive de la création : la Spiritualité universelle. La réaction de la substance, sous l’influence verbale, en constitue la partie négative : la Corporéité universelle. Leur adaptation sympathique, dont l’agent est l’AMOUR universel, en constitue la partie mitoyenne : l’Animisme universel.
Ce que le verbe spécifie comme principe, la Substance le développe comme faculté, mais, la substance à son tour reproduit le Verbe., d’où, le Verbe latent et le Verbe formulé. C’est pourquoi la Vierge mère s’appelle la Vierge noire, puis ensuite la Vierge de lumière car engendrant la lumière. Le Verbe étant la cause et la Substance le moyen, une triple vie, réflexion de la Vie absolu du Verbe, circule dans la création, suivant 3 modalités : l’Intellectuelle, l’Animique et l’Instinctive. La vie volitive qui les embrasse et les unifie est le principe de Liberté de la créature, ne relevant que du Verbe. Ces 3 en 1 forment le quaternaire universel, la mystérieuse Tétrade des Pythagoriciens.
L’activité verbale engendre l’Esprit universel. La réceptivité substantielle formule le Corps universel. Ces deux tendances complémentaires s’équilibrent dans l’Ame universelle. Ce troisième terme a pour fondement la mutuelle attraction du Verbe et de la Substance qui opère la conversion de leur double nature, nœud vital par lequel le Non-Être peut participer, selon le libre plan providentiel, à la nature de l’Être.
Tout ce qui est susceptible de plus ou de moins, est limité. Or la limite est la caractéristique de l’Individuel. Tout ce qui n’en est pas susceptible est illimité donc Universel, soit 2 ordres de productions, inversement hiérarchisés : l’Universel et l’Individuel. En vain, l’Individuel voudrait s’universaliser, reculant cette limite aussi loin que sa nature le lui permet, il n’y arriverait cependant pas. L’Individuel ne parvient qu’au Collectif et, un Collectif unifié se comporte à son tour comme un Individu. Le passage de l’Universel à l’Individuel constitue l’Involution, le retour de l’Individuel à l’Universel, constitue l’Evolution. Mais, qui peut le plus peu le moins, tandis que qui peut le moins ne peut pas toujours le plus, autrement dit, l’Être Universel à bien pu s’individualiser de son propre mouvement, mais l’Être Individualisé, réduit à ses seules forces, ne saurait par lui même s’Universaliser.
La polarisation de la Substance Universelle sous l’influence du Verbe donna naissance au Cosmos primitif. La réaction de la passivité substantielle sur l’activité verbale est la source de l’Universelle corporéité et, la racine de l’égoïsme des créatures. Cette transformation néfaste est une possibilité mais non une fatalité, une latence et non une virtualité en tant que possibilité opposée. Une partie des créatures du Cosmos Primitif, ayant délibérément développé cette possibilité égoïste, en rejetant l’Amour, tenta de s’emparer de la Substance-Mère et de la Vie verbale qui l’animait. Ce fut la « chute » des anges révoltés. Enfermés dans l’œuf substantiel qu’ils avaient condensé autour d’eux, ils réalisèrent le royaume de l’Anti-Verbe, la hiérarchie des Bas-Lieux..
L’égoïsme-orgueil ayant tout transformé, en eux et hors d’eux, fils de l’infini, ils connurent l’espace, fils de l’éternité, ils subirent le temps, fils de l’unité, ils expérimentèrent le poids et le nombre. Le mouvement rectiligne devint circulaire, l’expansion refoulée devint tourbillon. Les zodiaques naquirent. Les Soleils physiques apparurent, le mouvement astral reçut ses impulsions mécaniques. Ce qui avait été essence libre et lumineuse devint force compacte et ténébreuse. Ce qui avait été libre motion dans l’éther devint gravitation au sein du ciel physique.
L’œuf cosmique du monde n’était pas le principe mais l’origine accidentelle des choses. En lui régnait, comme le relatent les cosmogonies Phéniciennes et leur fille, la cosmogonie orphique, le Temps, l’Espace, la Nuit : le Temps, né du désir de la vie pour la matière, l’Espace, né de la limite égoïste, la Nuit ; née de l’isolement total, de la scission opérée entre la créature et son Créateur. Séparés de l’Amour, ces créatures connurent la haine, ayant rejeté la Lumière. Ils enfantèrent l’erreur ténébreuse, désorbités et désaxés, ils durent ressentir la douleur. Telle fut la première involution : les ténèbres chaotiques.
C’est alors que la divine sollicitude conçut l’Homme comme médiateur cosmique entre le Ciel et les enfers, pour cette créature pivotale, un univers mixte fut crée et, l’Homme Universel, reflet de l’INCREE, en fut le couronnement. Tous les dons divins lui furent infusés, en principe, mais en fait, à cause de sa double nature, plongeant par ses racines obscures dans le temporel et par sa cime lumineuse dans l’éternel, il ne possédait en propre que son indestructible volonté, laquelle, à l’image de la volonté suprême, n’était nécessitée par aucune loi extérieure à lui.
Pourtant, avant d’avoir fait passer de puissance en acte toutes ses facultés, une présomption orgueilleuse le précipita au sein des sphères inférieures qu’il avait convoitées et voulait asservir à sa propre autorité, obéissant ainsi aux suggestions du Grand Révolté. Le terrible tourbillon qui défendait l’accès de ces mondes l’aspira et le rejeta au centre même du chaos, sous l’étreinte du destin. Telle fut la seconde involution : la matérialisation de l’Adam originel.
Telle est la loi des chutes : l’égoïsme détermine la possessivité. Celle-ci génère l’attraction au centre et provoque la concrétion des fluides. Cette condensation est la cause d’un mouvement de vortex qui enferme les êtres dans leur sphère propre. De là, le mouvement indéfini de la roue du temps, en circuit fermé. Ce mouvement nécessite la mutation des créatures et celle-ci engendre l’alternance des veilles et des sommeils, des naissances et des morts. La mort amène la dissolution des formes dans l’espace et, de là, leur recomposition. La roue tourne et nul ne s’en évade parmi ceux sui se sont livrés à l’inflexible destin.
André SAVORET (1898-1977) Druide, écrivain et poète
Extrait de « la voie des ancêtres » 1931
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